Pictet Group
Manger plus vert
Les systèmes alimentaires actuels sont en échec et ne seront pas en mesure de nourrir une population mondiale qui devrait atteindre 10 milliards d’ici 2050. Pour résoudre ce problème, des solutions innovantes de la part des entreprises et de leurs actionnaires sont donc indispensables. Et les investisseurs peuvent jouer un rôle majeur en identifiant les activités proposant ces solutions, en orientant les capitaux vers ces activités et en dialoguant activement avec les entreprises pour accélérer la transition.
Les systèmes alimentaires sont au cœur de certains des enjeux environnementaux et sociaux les plus urgents. La malnutrition est en effet la principale cause de mortalité et de maladie dans le monde, 40% des décès étant associés à un régime alimentaire pauvre. Mais avant même de se demander si l’alimentation est nourrissante, il faut d’abord veiller à ce qu’elle soit saine; chaque année, une personne sur 10 souffre ainsi d’une maladie d’origine alimentaire. Car plus d’un quart de la population mondiale ne peut accéder à une alimentation saine et nourrissante, et pourtant, chaque année, un tiers des denrées alimentaires produites est jeté.
La malnutrition et l’insécurité alimentaire ont par ailleurs été exacerbées par la pandémie ainsi que par les conflits à travers le monde. Dans le même temps, les considérations environnementales menacent fortement l’avenir de notre sécurité alimentaire. En effet, les systèmes alimentaires sont déjà responsables d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre (GES), de l’utilisation de 40% des sols, de 70% de la consommation d’eau potable et de 47% des pressions sur la biodiversité.
L’enjeu est donc d’assurer une sécurité alimentaire mondiale pour tous, de nourrir une population en expansion et de réduire les maladies et la mortalité liées à une mauvaise alimentation, tout en préservant la planète afin qu’elle puisse continuer à nous nourrir. Une multitude de solutions est nécessaire tout au long de la chaîne alimentaire, de la ferme à l’assiette. Elles doivent contribuer à améliorer la disponibilité des produits alimentaires et à proposer des solutions et des technologies qui favorisent des régimes alimentaires plus sains, en luttant contre la faim et la malnutrition.
Cependant, tout n’est pas si sombre, puisque le secteur privé relève le défi grâce à des innovations qui constituent des solutions au problème et des opportunités pour les investisseurs. Ainsi, grâce aux technologies agricoles de précision, on peut produire plus de denrées alimentaires avec la même quantité d’intrants, voire moins, c’est ce qu’on appelle «l’agriculture 4.0». On peut citer par exemple l’utilisation de drones avec systèmes de télédétection ou d’équipements agricoles automatisés qui s’appuient sur l’intelligence artificielle (IA). Les technologies qui contribuent à lutter contre le gaspillage alimentaire peuvent également s’avérer très utiles pour réduire les pénuries. Grâce aux systèmes logistiques, il est aussi possible de redistribuer les aliments encore comestibles aux banques alimentaires ou aux soupes populaires. L’IA et les capteurs peuvent améliorer les systèmes de tri des aliments.
L’emballage dit aseptique constitue une autre technologie simple, mais très puissante, puisqu’elle élimine le recours aux conservateurs chimiques ou la nécessité de réfrigérer les aliments, ce qui représente une formidable opportunité de réduire les déchets et de proposer des aliments sains aux pays en développement ne disposant pas de chaîne du froid. La réponse aux problématiques de régimes alimentaires, de famines et de malnutrition suppose des réponses multiples, dont le développement d’aliments à forte valeur nutritionnelle à des prix abordables, mais aussi la distribution de produits alimentaires enrichis pour lutter contre les carences en micronutriments. De nouveaux investissements innovants dans les technologies de diagnostic en matière de sécurité alimentaire peuvent contribuer à prévenir l’émergence et la propagation de maladies d’origine alimentaire ainsi qu’à identifier la présence de substances toxiques dans les aliments que nous mangeons.
Les investisseurs ont un rôle à jouer dans la mise en place de systèmes alimentaires responsables par trois moyens: identifier les activités et les entreprises qui contribuent à cette transition, allouer des fonds à ces entreprises afin qu’elles développent leurs activités, soit en leur octroyant du capital primaire, soit en réduisant le coût du capital, et enfin exercer activement les droits de vote. Les actionnaires ou les investisseurs de ces entreprises, en particulier si leur démarche est axée sur le long terme, peuvent les encourager à accélérer les progrès collectifs vers des systèmes plus durables.
Au final, nous sommes capables de produire les denrées dont le monde a besoin en améliorant nos systèmes alimentaires. Selon l’EAT-Lancet Commission, plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) estiment que l’alimentation est le principal levier d’optimisation de la santé des populations et du développement durable. Chez Pictet, nous sommes aussi de cet avis. Par des investissements importants et des programmes de mobilisation, il est possible de favoriser la transition vers des systèmes alimentaires plus fiables, si les investisseurs s’engagent dans une réflexion à la fois durable et responsable.